4 en 1 – MODERN LOVE, Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes, Pas dormir, Un homme dans la brume

Après plusieurs semaines passées sans publier une seule ligne, il est grand temps de reprendre du collier…

MODERN LOVE – Sous la direction de Daniel Jones, créateur et responsable de Modern Love, la rubrique culte du New York Times, quelques quarante récits parus entre 2004 et 2019 ont été rassemblés en un livre divisé en trois parties.

Si comme moi vous n’avez jamais lu la célèbre rubrique, Modern Love propose une séance de rattrapage et je vous préviens, on devient vite accro! Telles de petites nouvelles, l’amour sous toutes ses formes y est évoqué. Vous croyez tout connaître sur les histoires d’amour, la famille, les enfants, le divorce, les réseaux sociaux, les expériences sexuelles, et bien certains témoignages vous prouveront le contraire. Et même si parfois il s’agit d’un récit commun, le style narratif peut sortir du lot puisque chaque texte est écrit par un auteur différent. Vous savez, c’est comme le sachet de chips, encore une, encore une.

La qualité d’écriture et la variété des histoires offrent un excellent moment de lecture. Des tranches de vies drôles, touchantes, bouleversantes. D’une profondeur surprenante.

«À force de vouloir tout faire et de mener une vie ordonnée, ma mère, hélas, ratait tous les aspects agréables du quotidien familial, et de la vie en général: rigoler pour des bêtises, s’allonger sur le canapé blotti contre ceux qu’on aime, partager un bon repas, sans parler du plaisir de sentir vos enfants vous grimper dessus en riant à gorge déployée. Sans cela, le quotidien d’une famille n’est qu’une succession inlassable de tâches ingrates: essuyer des plans de travail et des nez qui coulent, nettoyer des assiettes et des petits corps, plier des draps blancs ou de couleur, encore et encore, jusqu’à l’anéantissement de votre âme.»

Éditions Phébus, février 2021, titre original Modern Love: True Stories of Love, Loss, and Redemption – Revised and Updated, traduit de l’anglais par Carine Chichereau et David Fauquemberg, 302 pages

 

 

QUATRE HEURES, VINGT-DEUX MINUTES ET DIX-HUIT SECONDES – Lionel Shriver ◊ Ma première lecture de la rentrée littéraire, intéressée par le sujet et curieuse de lire enfin cette auteure américaine.

Remington, sexagénaire en bonne forme mais pas très sportif, annonce à son épouse Serenata qu’il va courir un marathon! Touchée dans son égo, ce projet n’emballe pas du tout Serenata car dans le couple, depuis toujours c’est elle la sportive, et, elle n’a jamais couru une telle distance. Souffrant de problèmes de genoux, celle-ci doit plutôt faire face aux premiers renoncements liés à l’âge.

Remington s’entraîne avec l’aide de la jeune et sexy coach nommée Bambi et tombe dans la marmite du sport d’endurance. Malheureusement pour Serenata, ça ne fait que commencer. Le marathon sera l’occasion de retrouvailles animées avec leur fille sous emprise de la religion, et sa nombreuse progéniture. Envahie dans son espace, sous pression, Serenata doit alors jouer la grand-mère parfaite et avaler les reproches de sa fille.

Ce roman soulève un grand nombre de questions, le rapport à la maternité, la jalousie au sein du couple…, est-on toujours heureux de ce qu’accompli son conjoint? l’obsession du politiquement correct dans la société américaine, et bien sûr le culte du corps par le sport et la difficulté d’accepter de vieillir.

«Ce que je veux dire, c’est que je n’aime pas ma supérieure immédiate, je le reconnais, c’est vrai – mais pas parce que je suis raciste ou sexiste ou anti-immigrés. Pas parce que je suis quelque choso-phobe. Je ne l’aime pas personnellement. En tant qu’individu. Est-ce encore possible? Est-il légal de nourrir de l’animosité à l’égard d’une personne en particulier qui s’avère appartenir à une «population marginalisée»?

Serenata est un personnage antipathique à souhait, certains traits de caractères sont caricaturaux, les situations tirées à l’extrême, mais avec une grande acuité, et ma foi c’est très drôle! 

Un roman au ton acerbe et mordant, malgré le côté un peu rébarbatif des propos.

Éditions Belfond, août 2021, titre original The Motion of The Body Through Space, traduit de l’anglais (États-Unis) par Catherine Gibert, 384 pages 

 

PAS DORMIR – Marie Darrieussecq ◊ Un essai passionnant et intime sur l’insomnie. L’auteure a tout tenté: somnifères, alcool, médecines naturelles, massages, mais elle ne dort plus. 

Au travers de la littérature, de récits historiques, de croyances, Marie Darrieussecq dissèque le sujet et explique avec justesse les conséquences psychologiques de nuits sans sommeil. Ce truc terrible de ne pas réussir à dormir.

«Pas dormir», étonnamment énergisant, permet de se sentir moins seul. Instructif, très intéressant, je l’ai lu d’une traite… le temps d’une nuit d’insomnie. 

P.O.L éditeur, septembre 2021, 320 pages

 

UN HOMME DANS LA BRUME – Dorothy B. Hughes ◊ Dix est installé à Beverly Hills dans un appartement prêté par un ami. Nous sommes juste après la Seconde Guerre mondiale. Il se prétend écrivain mais n’a pas l’air d’y consacrer beaucoup de temps. Dix reprend contact avec Burb, ancien pilote comme lui. Son ami enquête sur une série de meurtres perpétrés sur des femmes par un mystérieux étrangleur. 

Dix aime les jolies femmes, il entretient une relation amoureuse avec sa voisine Laurel et sort souvent manger dans un club huppé avec Burb et son épouse.

Une atmosphère mystérieuse et tendue enveloppe ce roman dès les premières lignes. La romancière sème le doute sur la personnalité de Dix, un homme sans repère après avoir participé à des années de conflits. L’émancipation des figures féminines exerce un sentiment de frustration sur le personnage central et sa vraie personnalité va se révéler petit à petit.

Bien que ce genre de lecture ne soit pas le mien, l’ambiance surannée dans les rues chics de Los Angeles ou de Santa Monica, les descriptions des tenues vestimentaires, le côté vieux film, l’écriture agréable, m’ont charmée. 

L’un des rares romans noirs écrit par une femme, le texte a été adapté au cinéma, «Le Violent» de Nicholas Ray, avec Humphrey Bogart et Gloria Grahame.

Éditions Payot & Rivages, Rivages/noir (poche), 2019, paru en 1947 sous le titre original In A Lonely Place, traduit de l’anglais (États-Unis) par Simon Baril, 300 pages

 

Et je me réjouis déjà de vous parler de ces titres, dont un coup de coeur, une déception, et … qui est quoi? Je ne sais pas vous, mais je trouve cette rentrée littéraire de très bonne facture !

 

6 Comments

  • SANDRINE

    Ravie de te retrouver ! et pour plusieurs billets, je crois que le Caribou n’a pas fini la lecture du Shriver ? ou j’ai oublié .. j’ai failli lui piquer ! Sinon, hâte de savoir qui est la déception. Pour ma part, j’abandonne.. j’ai traîné la pauvre Emma Bovary pendant une semaine et rien n’y fait – et mon méchant rhume revenu à l’attaque ce week-end m’empêche de lire (sinusite) du coup, j’ai hâte de te lire toi !

    • meellaa

      Quelle poisse, une sinusite et un abandon, comme retour de vacances on a fait mieux. J’espère que tu peux à nouveau lire, bon rétablissement. J’ai lu Emma Bovary, il y a des années, j’étais bien trop jeune à mon avis. Je crois que j’avais aimé, mais je ne suis pas certaine que ça serait le cas aujourd’hui, vu ma déception sur l’une de mes dernières lectures. Elle arrive d’ailleurs…r
      Si, si, Marie-Claude a même écrit un billet sur le Shriver! J’en lirai d’autres à coup sûr, mais celui-ci tourne un peu en rond à mon humble avis. Je vais de ce pas lire ton dernier post, beaucoup, beaucoup de retard par ici.

  • Marie-Claude

    Enfin, une reprise du collier!
    Comme tu le sais, j’adore ce format de 3-4 dans 1.
    Tu viens de piquer ma curiosité pour Modern Love. Et moi qui pensais qu’il s’agissait d’un livre de photos! Complètement à côté de la plaque.
    Ce Shriver a quelque chose d’à la fois jouissif et de plombant. Ce n’est pas son meilleur, loin s’en faut, mais il est mieux que d’autres!
    Et dire que je n’ai jamais lu Darrieussecq. Ce titre ne me tente pas trop, par contre.
    Réussiras-tu à me vendre le Pourchet? Hâte de lire tes mots.

    • meellaa

      Le temps passe si vite…
      Modern Love mérite vraiment le détour. Cette lecture s’est avérée être une excellente surprise. J’ai vraiment adoré, il ne s’agit pas uniquement d’histoire d’amour dans un couple, mais de l’amour au sens large. On passe par toutes les émotions.
      De passage à Bordeaux au mois de septembre, je suis sortie d’une fameuse librairie les bras chargée (majoritairement des poches, raisonnable…) et j’aurais presque pu te dédicacer mes achats « sur conseil de Marie-Claude »! Dont un Loniel Shriver, Il faut qu’on parle de Kevin. Je poursuis avec cette auteure en tout cas.
      Darrieussecq, j’aime bien, sans plus. J’en ai lu quelques uns, mais j’ai un peu du mal à m’en rappeler… C’est le sujet qui m’a attirée dans ce cas.
      Pourchet… suspens 🙂

    • Marie-Claude

      Je viens d’acheter d’occasion Modern Love. Au programme du prochain Mai en nouvelles!
      Cette librairie de Bordeaux semblaient fourmiller de bons livres, alors! Tu me dis tes trouvailles, outre le Kevin (bouleversant)? Aucune comparaison avec ses autres romans. Elle se fait moins vindicative, plus modérée; le sujet en lui-même n’en devient que plus terrifiant. La mère que tu es sera touchée!
      Au final, je ne vais pas me presser pour découvrir Darrieussecq!
      J’attends impatiemment tes mots sur le Pourchet!

    • meellaa

      Oh génial! Tu ne devrais pas être déçue.
      Cette librairie géante est simplement la meilleure que j’ai visitée. Des piles et des piles jusqu’au plafond, des couloirs sur couloirs, des rayons étrangers en veux-tu en voilà, bref le lieu de la perdition! Je me réjouis de plonger dans ce Shriver, ton commentaire me donne encore plus envie. Et pour le reste de mes achats, je prévois un partage Instagram, tout le monde pourra ainsi profiter de tes conseils!
      L’avis Pourchet est rédigé, il arrive début de semaine.
      Et toi, comment se passe la lecture de ce pavé à la fois intriguant et impressionnant?

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